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Polémique

19 Février 2014 , Rédigé par Bibliothèque municipale

Polémique

Parce que je suis contre la censure et que la bêtise et l'ignorance m'agacent...

Marc Daniau, auteur, illustrateur du livre polémique "Tous à poil" réagit à la polémique autour de ce livre destiné à la jeunesse.

(Propos recueillis par Mélissa Bounoua pour Le nouvel observateur)

Je suis l'auteur du livre "Tous à poil" : Copé n'a rien compris à notre ouvrage.

"Tous à poil" (éd. du Rouergue) figure depuis quelques temps dans une liste d’une association ardéchoise qui recense 100 livres pour parler de l’égalité entre filles et garçons. Cette liste a été proposée par le centre régional de documentation pédagogique de l'académie de Grenoble et donc suggérée aux enseignants.

C’est sûrement parce que le titre du livre est efficace que Jean-François Copé ou son équipe de communication ont choisi de le présenter en exemple sur le plateau de LCI. Pourtant, qu’y trouve-t-on de choquant ? Ce sont des images avec très peu de texte, une liste de personnages que l’on voit se déshabiller. À la fin du livre, ils se retrouvent à la plage, nus et vont se baigner dans la joie et la bonne humeur. Nos personnages sont des figures du quotidien ou issues de l’imaginaire des enfants : il y a le personnel de la cantine, la maîtresse d’école (ça fait référence à la chanson "la maîtresse en maillot de bain"). À voir ce qu’il en dit et comment il l’utilise dans son argumentaire, la grille lecture de Jean-François Copé semble donc superficielle. Surtout, il se trompe d’ennemi.

Répondre aux questions des enfants sur le corps

C’est un faux débat autour de la nudité, nous avons essayé de proposer une approche originale et drôle. Si l’on suit la façon de penser du patron de l’UMP, il ne faudrait plus emmener les enfants au musée. Le plafond de la chapelle Sixtine ne choque personne !

Nous avons voulu montrer que nous sommes tous différents, qu’il y a des gros, des petits, des maigres, des grands, des noirs, des blancs. Il n’y a aucun gros plan sur les corps.

Nous avons eu l’idée de ce livre parce que nous avons quatre enfants qui avaient entre 11 et 16 ans à l’époque de la sortie. Nous savons que les enfants se posent des questions sur leur corps : ils cherchent à savoir s'ils sont normaux, à savoir comment nous sommes faits, comment les autres sont faits. Si on laisse les enfants se débrouiller seuls avec ces questions, que trouvent-ils ? Vont-ils sur internet ? Même s’ils n’y pensent pas, dans le monde dans lequel on vit, c’est impossible de ne pas s’interroger sur tout ce que l’on voit dans les magazines, les publicités, les émissions de télé.

Notre livre était une réponse à ces images de corps retouchées que l’on voit apparaître partout. Ces corps n’ont plus rien de vrai. Cette perception renvoie à la haine de soi, nous voulions proposer un autre regard sur la nudité qui soit décomplexant.

Ce n'est pas à la littérature jeunesse qu'il faut s'en prendre

Il me semble assez grave qu’un responsable de parti politique mette en cause aussi violemment l’éducation nationale, comme s’il y avait un complot pour pervertir les enfants. Et c'est dommage de taper sur la littérature jeunesse, un domaine fragile où il y a beaucoup de créativité, d’énergie, de réflexion. Il pourrait s’attaquer à d’autres. Pourquoi ne remet-il pas en cause les émissions de télé-réalité plutôt qu’un livre jeunesse ?

Nous sommes bien conscients du fait que le livre peut faire débattre. Quand "Tous à poil" est paru il y a des discussions dans les librairies et les bibliothèques : certains se demandaient si cela ne poserait pas de problème de le mettre en avant. Les fois où l'on en a parlé avec des enfants, certains enseignants nous ont dit qu'ils n'étaient pas à l’aise avec et qu'ils n’en parleraient pas. Mais ils tenaient à nous laisser en parler. Encore une fois, nous n'avons cherché à obliger personne à le lire ou le faire lire.

Notre livre a été écrit pour être drôle et les enfants ne s'y trompent pas. Nous y montrons la vie telle qu'elle est et eux n'ont aucun problème avec ça, ce sont les adultes qui émettent certaines réserves. Nous le comprenons mais il ne faut pas s’arrêter de créer, de proposer pour autant. Si l’on ne peut pas parler de la vie via la culture, à quoi bon ?

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